James Prescott Joule

Physicien britannique

James Prescott Joule, né le à Salford, près de Manchester (Angleterre) et mort le à Sale (Angleterre), est un physicien anglais.

Son étude sur la nature de la chaleur et sa découverte de la relation avec le travail mécanique l'ont conduit à la théorie de la conservation de l'énergie (la première loi de la thermodynamique). Il a également énoncé une relation entre le courant électrique traversant une résistance et la chaleur dissipée par celle-ci, appelée depuis le XXe siècle la loi de Joule. Enfin il a travaillé avec Lord Kelvin pour développer l'échelle absolue de température et a étudié la magnétostriction. En 1850, il devient membre de la Royal Society. En 1852, il est lauréat de la Royal Medal et, en 1870, il reçoit la médaille Copley. Dans le Système international, l'unité de l'énergie et de la quantité de chaleur[1] porte son nom : le joule.

Biographie

Jeunesse

Fils du brasseur Benjamin Joule (1784-1858), James Prescott Joule est éduqué à domicile jusqu'en 1842, date à laquelle il est envoyé avec son frère aîné pour étudier à la Manchester Literary and Philosophical Society, où il reçoit notamment l'enseignement de John Dalton, un de ses professeurs qui va marquer sa vie professionnelle. Les deux frères étudient deux ans la géométrie et l'arithmétique avant que Dalton ne soit forcé de prendre sa retraite en raison d'un AVC. Cependant l'influence de Dalton fut décisive, de même que celle de son associé le chimiste William Henry et des ingénieurs de Manchester Peter Ewart et Eaton Hodgkinson. John Davies prend alors en charge leur éducation. Joule est bientôt fasciné par l'électricité qu'il expérimente avec son frère en se donnant mutuellement des chocs électriques[2].

Joule travaille ensuite dans la brasserie familiale et y prend un rôle actif jusqu'à la vente de l'usine en 1854. C'est également cette année que sa femme décède après six ans de mariage, lui laissant leurs jeunes enfants à charge. La science n'est alors pour lui qu'un loisir mais il commence rapidement à étudier la faisabilité du remplacement de la machine à vapeur de la brasserie par le moteur électrique qui vient d'être inventé. En 1838, il écrit sa première publication scientifique dans Annals of electricity, le journal scientifique créé par William Sturgeon, collègue de Davies. Il découvre l'effet Joule en 1840[3] et espère une publication par la Royal Society, mais découvre, qu'il est très peu considéré par celle-ci en raison de son origine provinciale et de sa formation scientifique décousue. Il deviendra seulement membre de la Royal Society 10 ans plus tard, en 1850. Sturgeon déménage à Manchester en 1840, Joule et lui deviennent le centre d'un cercle d'intellectuels mancuniens. Les deux considèrent que sciences et technologie pourraient et devraient être intégrées[2].

Il découvre qu'une livre de charbon dans une machine à vapeur produit cinq fois plus de travail qu'une livre de zinc consommée dans une cellule de Grove[4], un des premiers modèles de piles électriques[5]. Le concept de travail économique[6] de Joule est la capacité d'élever une masse d'une livre de un pied, le pied-livre[7],[2].

Joule était influencé par les idées de Franz Aepinus et tenta d'expliquer les phénomènes électrique et magnétique en termes d'atomes entourés par un « éther calorifique en état de vibration »[2].

Cependant, l'intérêt de Joule se détourna de la question financière restreinte pour celle de la détermination de la quantité d'énergie que pouvait fournir une source donnée d'énergie, l'amenant à supposer la nature convertible de l'énergie. En 1843 il publie des résultats expérimentaux montrant que l'effet thermique qu'il avait quantifié en 1841 était dû à la génération de chaleur dans le matériau conducteur et non de son transfert depuis une autre partie du matériel[8]. Cela constituait une remise en cause directe de la théorie du calorique qui supposait que la chaleur ne pouvait ni être créée ni être détruite et qui dominait le débat scientifique depuis son introduction par Antoine Lavoisier en 1783. Le prestige de Lavoisier et les succès pratiques de la théorie du calorique acquis par Sadi Carnot à propos des machines thermiques depuis 1824 ont rendu difficile l'acceptation des théories du jeune Joule, travaillant en dehors des milieux académiques ou de l'ingénierie. Les tenants de la théorie du calorique pointèrent rapidement la symétrie avec les effets Peltier et Seebeck pour prétendre que chaleur et courant étaient mutuellement convertibles, au moins approximativement, par un processus réversible[2].

L'équivalent mécanique de la chaleur

James Joule.
L'appareil de Joule (1845).
L'appareil ayant servi dans l'expérience de Joule pour mesurer l'équivalent mécanique de la chaleur.

Joule écrit dans son article de 1843 :

« ... la puissance mécanique employée pour faire tourner une machine électro-magnétique est convertie en chaleur qui provient du passage des courants d'induction à travers ses bobines ; et, d'un autre côté, la puissance motrice du moteur est obtenue aux dépens de la chaleur de la réaction chimique de la batterie grâce à laquelle il fonctionne. »

Joule adopte ici le terme de living force ou vis viva (Force vive, énergie), parce qu'il entend le mot force au sens de Leibniz (m·v2), qu'il cite en exergue de son papier de 1849[9].

Davantage d'expériences et des mesures l'amènent à considérer l'« équivalent mécanique de la chaleur » par la conversion suivante : 838 pieds-livres de travail sont nécessaires pour élever la température d'une livre d'eau d'un degré Fahrenheit[10]. Il annonce ces résultats à une réunion de la section Chimie de la British Association for the Advancement of Science à Cork en 1843. Il y est accueilli par le silence.

Opiniâtre, Joule commence à chercher une démonstration purement mécanique de la conversion du travail en chaleur. En forçant le passage d'eau à travers un cylindre perforé, il est capable de mesurer un léger échauffement visqueux du fluide. Il obtient alors l'équivalent de 770 pied-livre/BTU (soit 4,14 J/cal). Le fait que les valeurs obtenues aussi bien électriquement que purement mécaniquement soient identiques, au moins au premier ordre, était pour Joule la preuve de la convertibilité du travail en chaleur.

Joule essaye également une troisième voie : il mesure la chaleur générée lors d'un travail de compression d'un gaz. Il obtient alors l'équivalent mécanique de 823 pied-livre/BTU (4,43 J/cal)[11]. D'une certaine façon cette expérience est celle qui exposait le plus Joule aux critiques mais il anticipe les objections par une pratique expérimentale ingénieuse. Néanmoins son article est refusé par la Royal Society et il doit se contenter d'une publication dans le Philosophical Magazine.

Dans cet article il remet directement en cause la théorie calorique de Carnot et Émile Clapeyron mais ses motivations théologiques sont aussi évidentes :

« Je conçois que cette théorie est… opposée aux principes reconnus de la philosophie parce que la vis viva peut être détruite par une mauvaise utilisation de l'appareil : ainsi M. Clapeyron tire la conclusion que « la température du feu étant 1 000 à 2 000 °C supérieure à celle de la chaudière, il y a une énorme perte de vis viva dans le passage de la chaleur du foyer à la chaudière ». Croyant que la puissance de détruire revient à Dieu seul ; j'affirme… que toute théorie, qui une fois développée, nécessite l'annihilation de forces est forcément erronée. »

En 1845, Joule lit son article On the mechanical equivalent of heat à une réunion de la British Association à Cambridge[12]. Il y relate son travail le plus connu, utilisant une masse tombante pour faire tourner une roue à aubes dans un cylindre calorifugé rempli d'eau dont l'élévation de température est mesurée. Il estime à ce moment l'équivalent mécanique de la chaleur à 819 pieds-livres/BTU (4,41 J/cal).

En 1850, il publie une mesure plus fine de 772,692 pieds-livres/BTU (4,159 J/cal), encore plus proches des valeurs actuelles[13].

En 1852, Joule et William Thomson (plus tard Lord Kelvin) découvrent que lorsqu'un gaz se détend de façon adiabatique, la température du gaz chute. Ce phénomène a été appelé « effet Joule-Thomson » et a été utilisé pour construire une grande industrie du froid au 19e siècle.

Travaux de Joule

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « James Prescott Joule » (voir la liste des auteurs).
  1. Bureau International des Poids et Mesures
  2. a b c d et e Smith (2004)
  3. Joule, J.P. (1841) "On the heat evolved by metallic conductors of electricity" Philosophical Magazine, 19, 260; Scientific Papers 65
  4. William Robert Grove était alors sur le point de donner la première expression générale de la conservation de l'énergie. Ce qu'il fit en 1844.
  5. Smith (1998) p.60
  6. economical duty, en anglais
  7. Cette unité correspond à une quantité d'énergie. L'unité moderne du Système international est le joule : 1 pied-livre = 1,356 joule.
  8. Joule, J.P. (1843) Philosophical Magazine, 23, 263; Scientific Papers 123
  9. Joule, On the mechanical equivalent of heat, 1849 (lire en ligne).
  10. L'unité ici utilisée par Joule équivaut à 5.3803×10−3 J/calorie. L'approximation de Joule était donc de 4,51 J/cal, à comparer avec la valeur acceptée actuellement 4,186 0 J/cal (M.W. Zemansky (1968) Heat and Thermodynamics, 5th ed., p. 86).
  11. (en) Joule, J.P. (1845) "On the rarefaction and condensation of air" Philosophical Magazine, Scientific Papers 172
  12. Joule, J.P. (1845) "On the Mechanical Equivalent of Heat", Brit. Assoc. Rep., trans. Chemical Sect, p. 31, read before the British Association at Cambridge, June
  13. (en) James Prescott Joule, « On the Mechanical Equivalent of Heat », Philosophical Transactions of the Royal Society, vol. 140,‎ , p. 61-82 (ISSN 0261-0523, e-ISSN 2053-9223, DOI 10.1098/rstl.1850.0004, JSTOR 108427, Bibcode 1850RSPT..140...61P, S2CID 186209447).

Voir aussi

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Sources et bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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